La province Sud l’a compris depuis longtemps et agit aussi bien en matière de prévention qu’en matière d’intervention sur le terrain via, notamment les hélicoptères bombardiers d’eau et, c’est nouveau, la surveillance infrarouge des points chauds.
En matière de risques liés au feu, la province Sud a avant tout un rôle de prévention. Un rôle qu’elle assume au travers d’une campagne de sensibilisation du grand public, en octobre et en novembre. Cette campagne de deux mois est relayée tout au long de l’année par quatre gardes nature qui arpentent la province pour constater, surveiller, sensibiliser aux feux de brousse et qui viennent en soutien des services d’incendie et de secours et de la Sécurité civile en cas d’incendie des milieux naturels. Ces gardes s’assurent que des coupe-feux ont été réalisés et qu’ils sont entretenus. Ils sont également assermentés et peuvent, comme le code de l’environnement les y autorise, établir des procès-verbaux en cas d’infraction constatée. Ils sont par exemple intervenus, en parallèle de la procédure judicaire, auprès de l’incendiaire présumé deb l’île des Pins. Rappelons que le code de l’environnement de la province Sud prévoit un emprisonnement de six mois et une amende de 447 400 F, ou l’une de ces deux peines seulement, pour ceux qui ont causé l’incendie des bois, forêts, savanes, maquis, plantations et reboisements d’autrui. En matière de lutte contre les incendies, les missions des gardes nature se sont enrichies. Ces derniers mois, plusieurs formations leur ont été dispensées pour leur permettre de venir en soutien des pompiers engagés sur le terrain.
Les ERP sous contrôle provincial jusqu’à fin 2010
Ils ont ainsi appris comment ils devaient approcher un feu, comment ils pouvaient le combattre. Ils interviennent pour l’instant en seconde ligne, comme lors de l’incendie de l’île des Pins, mais pourront bientôt, expertise oblige, suivre les soldats du feu au plus près. Autre domaine où la province Sud s’investit, le contrôle de sécurité des établissements recevant du public (ERP). Et ce jusqu’au 1er janvier 2011 seulement, cette mission étant, depuis décembre 2009, de compétence gouvernementale. Pour l’heure, le bureau des ERP de la Province remplit cette mission pour le compte de la Nouvelle-Calédonie. Actuellement, tout ERP en province Sud est régi par une délibération du 18 octobre 2000 relative à la protection contre les risques d’incendie et de panique. La Province a choisi de responsabiliser les exploitants, chargés de faire effectuer les contrôles périodiques par des organismes de contrôle agréés. Chaque année, la sous-commission permanente de sécurité, présidée par le préventionniste de la province Sud, visite, avec le directeur du Cotsuel, des représentants des pompiers, de la police nationale ou de la gendarmerie, de la police municipale suivant les communes, et du maire, un certain nombre de structures. « Nous réalisons deux analyses, explique Sophie Delorme, la responsable du bureau des ERP. Une analyse de la conformité réglementaire et une analyse du risque. » Sont ainsi vérifiés, de façon non exhaustive, les fermetures des portes, les alarmes, les systèmes de détection de fumée, les matériel de lutte contre l’incendie… Si des anomalies apparaissent, le responsable de l’établissement est invité à effectuer les aménagements et/ou réparations nécessaires, lesquels seront vérifiés lors d’une seconde visite. En cas de risque majeur, la commission de sécurité émet un avis défavorable qui peut aller, dans les cas les plus extrêmes, jusqu’à entraîner la fermeture de l’établissement.
Dossier réalisé par Christine Allix
©Martial Dosdane - ©Fabrice Wenger
99 c’est le pourcentage des incendies directement imputables à la maladresse ou à la malveillance de l’homme 37 établissements recevant du public, sur les quelque 7 000 que compte la province Sud, ont été contrôlés en 2010 par la sous-commission permanente de sécurité 4 avis défavorables ont été donnés par la sous-commission permanente de sécurité |
L’EPIS : un dispositif trop peu lisible financièrement
Le projet d’EPIS (Établissement public d’incendie et de secours de la Nouvelle-Calédonie) fait débat car le gouvernement, la province Sud et les communes du Grand Nouméa s’inquiètent des conséquences financières liées à la mutualisation des moyens.
Tout le monde est d’accord : il est indispensable de repenser l’ensemble du dispositif de secours, au niveau du pays. Mais trop de questions posées restent sans réponse : combien cela va coûter et qui va payer. Le dispositif prévoit en effet un temps d’intervention limité à 20 minutes maximum, sur l’ensemble du territoire, ce qui implique la construction de 40 nouveaux centres de secours. À ce jour, aucun chiffrage de la restructuration n’a été communiqué aux collectivités impactées. Tout juste sait-on que le financement sera pris en charge par la Nouvelle-Calédonie, les provinces et les communes alors que les dépenses sont imposées par l’État au travers du schéma directeur d’analyse et de couverture des risques et du règlement opérationnel. « Au départ, l’Epis avait été pensé comme structure d’appui aux communes pour faire des achats groupés de matériel et financer des formations collectives, rappelle Bernard Chérioux, monsieur « risques majeurs » de la province Sud (1). Aujourd’hui, la Sécurité civile parle de service d’incendie et de secours à l’échelle de la Nouvelle-Calédonie tout entière. » Un grand écart que la province Sud n’est pas vraiment disposée à accepter, d’autant que, précise Bernard Chérioux, « l’État ne participe à l’opération qu’en investissement, et encore, à hauteur de 600 millions de francs seulement », ce qui, dans le meilleur des cas, ne permettra de construire que deux ou trois centres d’incendie et de secours. Si aucun chiffre définitif n’est avancé, les spécialistes parlent tout de même d’une dépense annuelle de fonctionnement comprise entre 1 et 5 milliards de francs. De quoi faire réfléchir des élus provinciaux déjà confrontés à une situation budgétaire globale particulièrement difficile. « Nous allons vers un blocage », commente Bernard Chérioux, qui conclut : « Plus que pour un système comme l’EPIS, la province Sud milite pour une organisation intercommunale, pensée en fonction des bassins à risques. »
(1) Une délégation a été créée par la province Sud afin d’améliorer la coordination des actions, la connaissance des risques, de leurs conséquences et les mesures de prévention qui doivent être mises en oeuvre.
L’oeil infrarouge de la Cinéflex pour repérer les points chauds
On l’a vu lors de l’incendie de l’île des Pins, la Cinéflex, la caméra à vision infrarouge embarquée sur hélicoptère de la province Sud, peut permettre de limiter les dégâts. Ainsi, grâce à son utilisation, quarante-huit heures d’intervention et plus de quatorze millions de francs ont été économisés. « La vision infrarouge permet de repérer les points chauds que l’on ne peut voir à l’oeil nu, explique Martial Dosdane, l’agent provincial formé à l’utilisation de ce matériel très performant. Et de déployer les moyens terrestres au bon endroit. » Équipée d’un zoom extrêmement puissant, cette caméra est aussi très stable, car gyrostabilisée, et donc insensible aux vibrations. Précision non négligeable, elle peut donner les coordonnées GPS de chaque point chaud. Achetée au prix fort – plus de 100 millions de francs – en décembre 2009, la Cinéflex n’avait encore jamais servi depuis sa mise en opération le 2 janvier 2010. L’exécutif provincial, notamment pour la rentabiliser, se dit aujourd’hui prêt à la louer aux utilisateurs potentiels. Une convention est d’ailleurs en cours d’élaboration avec la Protection civile qui pourrait l’utiliser pendant la saison des feux.